L'Antilope d'Or

Fiche technique
Nom originalZolotaya Antilopa (ЗОЛОТАЯ АНТИЛОПА)
L'Antilope d'Or
OrigineRussie
Année de production1954
ProductionSoyuzmultfilm
Durée30 minutes
RéalisationLev Atamanov
ScénariiNikolai P. Abramov
AnimationRoman Kachanov, Vasiliy Ryabchikov, Boris Chani, Nikolai Fedorov, Konstantin Chikine, Renata Mirenkova, Viatcheslav Kotenotchkine, Vladimir Arbekov, Roman Davydov
Direction artistiqueAleksandr Vinokurov, Leonid Shvartsman
Direction du sonNikolai Prilutsky
DécorsIrina Svetlitsa, Dmitriy Anpilov, Konstantin Malychev, Olga Ghemmerling
MontageLidia Kyaksht
Direction photographieMikhail Druyan
MusiquesVladimir Yurovsky
Adaptation françaiseClaude Bonnardot (1er doublage)
Diffusions
1ère diffusion hertzienne05 mars 1964 (RTF - La Séquence du jeune spectateur)
1ère diff. Cable/Sat/TNT16 décembre 1995 (Canal J)
Rediffusions30 décembre 1965 (ORTF 1ère chaine - Émissions pour les jeunes)
23 décembre 1973 (TSR)
Décembre 1983 (Antenne 2)
13 septembre 1984 (Antenne 2 - Récré A2)
1er janvier 1994 (France 3)
22 septembre 1996 (Canal J)
Editions
Sortie en VHS1998 (Citel)
Sortie en DVD1er septembre 2003 (Citel - Les trésors de l'animation)
Synopsis

Dans la jungle indienne, le mahârâjâ et ses hommes chassent une antilope qu'ils parviennent presque à capturer. Mais dans sa fuite, sous une certaine impulsion de ses sauts mêlée au choc de ses sabots sur le sol, celle-ci laisse derrière elle, comme par magie, quelques pièces d'or. Ces dernières excitent encore un peu plus la détermination de ses poursuivants, mais lui permettent également sous l'effet de cette surprise, de les distancer un peu, les hommes ne pouvant s'empêcher de ramasser de suite la précieuse matière. A quelques arpents de terre plus loin, un jeune garçon qui, à l'aide d'un bœuf sacré, travaille la terre, perçoit au travers de la forêt cette agitation bruyante qui se rapproche, une flèche perdue allant même se ficher dans le bois de sa charrue. L'antilope arrive alors jusqu'à lui. Le jeune paysan admiratif de sa beauté, et comprenant rapidement la situation, lui permet de se cacher, et se débarrasse expressément des quelques pièces d'or que l'herbivore avait encore laissé derrière lui. Puis, il dit au mahârâjâ alors sur la piste du gracieux animal, qu'il a bien vu passé l'antilope, mais lui indique une fausse direction. Les pièces qu'il avait jeté un peu plus loin ayant été retrouvées par un serviteur du mahârâjâ, donneront un semblant de vérité à ses propos, et lui permettront d'éloigner la troupe humaine assoiffée d'or.

Pour le remercier de lui avoir sauvé la vie, le jeune garçon refusant toute récompense, l'Antilope d'Or lui révèle son véritable nom - Vijaya - et lui indique le lieu où elle réside, et l'invite à l'y rejoindre, si un jour, il a besoin d'aide. Mais le serviteur du mahârâjâ, resté sur les lieux, a aperçu l'antilope juste avant qu'elle ne quitte le garçon. Il tente de faire dire à ce dernier, dont on apprend alors qu'il n'a plus de père, où elle est partie, mais sans succès, puis se sauve sous une pluie de noix de coco que lui jette le peuple singe. Rapportant ce fait à son maître, celui-ci l'envoie chercher le garçon avec l'aide de deux soldats.

L'accusant d'avoir molesté son serviteur, alors qu'entre temps il lui a sauvé la vie contre un tigre, le mahârâjâ le punit à payer dix pièces d'or avant le levé du soleil, le lendemain, sinon il lui fait couper la tête. Conscient que le jeune garçon est dépourvu d'une telle richesse, et supposant à juste titre qu'il va demander de l'aide à l'antilope, il le fait suivre par son serviteur. Une longue promenade nocturne dans la jungle, entrecoupée de quelques rencontres animalières, s'offre alors au jeune paysan...

La morale principale concluant cette histoire montrera que d'une cupidité exacerbée, ne découle que la solitude et l'abandon, alors qu'une amitié simple et légère, peut durer au-delà de tout... que la richesse la plus précieuse est celle des sentiments...

Commentaires

Lev Atamanov, que l'on connait particulièrement en France au travers de quelques ouvrages cinématographiques, comme le film La Reine des Neiges, signait ici quatre ans avant ce dernier, une œuvre d'une tout aussi grande poésie. Comme pour celui-ci, l'utilisation de la technique dite de la rotoscopie était déjà de mise pour l'animation de certains personnages, comme ce fut le cas précédemment avec La Petite Fleur Écarlate du même Atamanov, et comme le fit cette année-là également le studio Soyuzmultfilm avec La Princesse Grenouille. Ainsi, après les frères Fleischer (dès leur début), Walt Disney (Blanche Neige et les Sept Nains), la Chine (La Princesse à l'éventail de fer dont la mise en scène était beaucoup trop dépendante), puis les italiens (La Rose de Bagdad au résultat proche des dernières œuvres des frères Fleischer), cette technique sera encore brillamment exploitée par les artistes russes qui renforceront encore un peu plus son utilisation au travers du réalisme naturel émanant de leurs compositions graphiques. Cela participait également au courant socialiste imposé alors sur les arts, ceux-ci se devant particulièrement d'être d'un certain réalisme et axés sur le patrimoine national.

Concernant l'inspiration, ce court-métrage puisait sa source au sein de plusieurs contes indiens, tout en faisant quelques légers échos à certaines nouvelles du Livre de la jungle de Rudyard Kipling. À cet égard, aux États-Unis, pour une édition vidéo du début des années 90, ce film d'animation prit le titre de Rudyard Kipling's, The Magic Antelope, ce qui dénotait totalement avec les réelles inspirations premières du film. On notera toutefois ces références pouvant se rapporter à Kipling, comme lorsque le garçon, tel Mowgli face à Shere Khan, s'oppose à un tigre, ici avec l'aide de son bœuf. De même, les quelques rencontres qu'il fera, alors qu'il va rejoindre l'antilope, sont aussi plus ou moins quelques clins d’œil à l'écrivain anglais (c'est aussi un passage que l'on retrouve souvent dans ce genre de contes où le jeune héros est appelé à parcourir un certain chemin, comme ce fut le cas pour le prince dans le film La Princesse Grenouille cité plus haut). Ces quelques images ne sont toutefois pas assez significatives pour associer le nom de Kipling au titre de cette œuvre.
Une partie de l'équipe artistique (Roman Davydov, Aleksandr Vinokurov, Nikolai Fedorov) œuvrera justement, la décennie suivante, sur Maugli (5 courts produits entre 1967 et 1971), une adaptation du Livre de la jungle et de son protagoniste principal, adaptant plus fidèlement les nouvelles de Kipling que son homologue disneyen en 1967. Cette œuvre présentait un Mowgli du plus jeune âge à celui d'adulte, avec notamment un Baloo représentatif de son nom, sous la forme d'un ours à collier - appelé bauloo en hindi -, en omettant toutefois, même s'il finira par les rejoindre, son passage chez les humains alors qu'il était enfant. De même, Bagheera y était une panthère femelle à la voix suave comme dans le roman, alors que l'ouvrage disneyen en fit un mâle. Elle y conservera également le moire de son pelage. Le même studio produira deux autres adaptations de Kipling, dont celle de Rikki-Tikki-Tavi, en 1965, d'après une autre nouvelle éponyme du Livre de la jungle. Elle est malheureusement inédite en France.

Dans L'Antilope d'Or, la cupidité du mahârâjâ, et le comportement extrême qu'il adopte, est particulièrement mis en scène dans quelques passages qui appuient cet état de façon à montrer le ridicule et l'évolution de ce qui deviendra comme une sorte de démence. Cela, notamment lors de la première rencontre entre le mahârâjâ et le jeune paysan : voulant le remercier de lui avoir indiqué la direction prise par l'antilope, et tout en soupesant les pièces d'or qu'il avait en main, le mahârâjâ lui offre tout simplement la vie, ce qui était plus que suffisant pour le garçon qui voyait en celle-ci la seule richesse établie. La scène finale montrera bien cette folie qui s'emparera totalement du mahârâjâ, mais aussi de ses serviteurs.

Le récit de ce conte faisait également quelque peu écho à l'histoire d'une personnalité historique de l'Inde. En effet, Jahângîr, empereur moghol qui régna de 1605 à 1627, captura lors de l'une de ses chasses, une antilope d'une grande beauté. Étant pour lui comme un trésor pour le regard, il la garda dans ses jardins de Hiran Minar, et lui donna pour nom Mansraaj. L'animal oublia quelque peu sa vie à l'état sauvage pour adopter son nouveau statut d'antilope royale (signification du nom qui lui fut donné). À sa mort, en 1620, Jahângîr lui fit ériger un monument sous la forme d'un minaret (celui-ci se trouve dans les jardins de Hiran Minar, à Sheikhupura, à quelques 40 km de Lahore, au Pakistan - le père de Kipling fut conservateur du Musée de Lahore).

L'antilope est un élément important dans la mythologie indienne. Elle est notamment l'un des signes du zodiaque et le symbole du djina Sânti dans le jaïnisme, l'une des religions indiennes. Sans y voir de rapport, on peut émettre l'idée que sa légèreté pourrait être mise ici en perspective avec la pesante atmosphère qui venait alors de quitter l'Union Soviétique, Staline étant mort en 1953.
Son nom - Vijaya, qui signifie victoire - fait écho à l'arc éponyme que possède Karna dans le Mahâbhârata, grande Épopée indienne et texte fondateur de l'hindouisme. C'est aussi l'un des noms d'Arjuna, personnage central au sein de la Bhagavad-Gitâ, l'un des textes du Mahâbhârata. Arjuna et Karna, demi-frères, combattront l'un contre l'autre… C'est justement par une flèche que s'annonce la rencontre entre le jeune paysan et l'antilope. Vishnu, qui sous l'avatar de Krishna était le cocher du char d'Arjuna, est également le protecteur de la vache sacrée. Le bœuf étant présent également lors de la première rencontre, on a, en cette seule scène, une concentration de symboles pouvant être appréciés plus particulièrement par le public indien. Mais ces références mises ici en perspective, appuyées et interprétées comme telles, n'étaient peut-être pas volontaires de la part des concepteurs de cette œuvre
À propos encore de ce nom - Vijaya -, il est utilisé également dans une variante de ce conte, en Indonésie (plus particulièrement dans la région Ouest de Java). L'Antilope d'Or y est en fait une princesse ayant pris cette apparence suite à une malédiction. Ici, c'est un vieil homme qui deviendra son ami. Mais une flèche du prince Vijaya va l'atteindre alors que celui-ci la chasse. Elle retrouvera grâce à cela sa véritable forme, celle de la princesse Sutha.

En dehors du doublage qui différencie les différentes versions d'un pays à un autre, on soulignera que la version française sur laquelle repose cet article - à supposer qu'il n'y en ait qu'une, ce qui est peu probable - n'a pas conservé les musiques originales composées par Vladimir Yurovsky (1915-1972). Ce dernier offrait une partition symphonique sensiblement expressive et subtile où la prédominance des cordes s'inspiraient d’œuvres classiques, cela avec un soupçon de musique slave. On y retrouve notamment le lyrisme musical de certaines partitions disneyennes telle celle de Bambi. À l'opposé, les compositions qui furent utilisées pour la version qui fut distribuée, ou redistribuée en France, était moins imposante, tout en étant colorée par des instruments indiens où le sitar s'imposait. Ceux-ci se mariaient notamment agréablement avec la scène de danse, alors que la composition originale de par son aspect symphonique dénotait quelque peu avec les mouvements des danseuses. Aucune source ne semble mentionner l'origine de cette nouvelle bande musicale, mais la version espagnole notamment, utilisa également celle-là même. Bien évidemment, à son écoute, un nom vient de suite à l'esprit, celui de Ravi Shankar. Toutefois, il nous est impossible pour le moment d'identifier cette musique, même si elle pourrait être le fait de ce compositeur, ou de l'un de ses homologues, bien que les quelques partitions la composant, même si elles sont agréables à l'écoute, ne semblent pas aussi élaborées que celle de ce maître de musique.
Cette version française fut conçue via le réalisateur et producteur américain Phil Roman, en 1993, sur une adaptation de Sindy McKay, dans la collection Animated Classic Showcase qui comprendra de nombreux films du studio Soyuzmultfilm. Ceux-ci seront par ailleurs diffusés au travers de cette collection, à plusieurs reprises sur Canal J, entre 1994 jusqu'aux environs de l'année 2000. À cet égard, on ne peut que déplorer que nombres de films d'animation russes comme celui-ci aient été aussi malmenés dans leur adaptation (avec quelques coupes notamment), alors que comme toute œuvre, une restitution respectueuse devrait être un acte naturel.

L'Antilope d'Or recevra de nombreux prix, dont parmi ceux-ci, en 1955, dans la catégorie court-métrage, le prix Mention Spécial du Jury du Festival de Cannes, 8ème édition. Beaucoup plus récemment, on trouve encore quelques échos envers l'animal magique, comme par exemple avec le réseau internet russe sans fil Golden WiFi qui a emprunté le nom de ce conte, de même que son image, pour son logo.

Merci à Jean-Pierre Nord pour l'identification des voix du premier doublage.

Doublage
Voix françaises (Studio SOFI) :
2ème doublage:
Agnès GribeVijaya l'Antilope d'Or
Tony Marotle jeune garçon
Henry Djanikle mahârâjâ, l'éléphant
Gérard Suruguele serviteur du mahârâjâ
Serge Lhorcahomme du mahârâjâ
Jacques Torrenshomme du mahârâjâ
Marie-Laure Dougnacl'oiseau
Jane Valle tigre
1er doublage:
Henri Vilbertle mahârâjâ
Raymond Destacle serviteur du mahârâjâ
Paul Demangevalet du mahârâjâ
Paul Bonifasl'éléphant
Auteur : Captain Jack
Doublage : Arachnée
Sources :
Fiche du film sur Kinoglaz
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Zolotaya Antilopa © Soyuzmultfilm
Fiche publiée le 04 avril 2010 - Dernière modification le 29 octobre 2024 - Lue 25644 fois